Ce matin, dans la salle d'attente de notre médecin de famille, pro-allaitement, un couple autour d'un tout petit bébé (dont j'apprendrai ensuite qu'il a 2 mois, pas si petit!). La mère a le bébé au sein, mais n'est pas à son aise. Elle a une jambe un peu surélevée pour hisser le bébé à la bonne hauteur. J'ai envie de lui glisser de mettre son pied sur une chaise d'enfant, juste à côté, pour qu'elle soit mieux installée, mais je n'ose pas. Elle se dandine un peu et houspille son bébé en chuchotant : " Bon, tu ne vas pas être content, mais on va arrêter maintenant, on va rentrer."
Le père lui dit : " Laisse-le téter un peu on a rien à faire pour le moment."
"Quelle heure est-il?"
"9 heures".
" Bon, on va arrêter, de toute façon tu ne tètes pas vraiment, tu ne déglutis pas."
" Mais si, il déglutit".
Je balance entre amusement, et agaçement. Je me plonge dans mon magazine, Pitère me tire les cheveux en gazouillant.
La mère commence à paraître excédée :
" Bon, ça fait déjà 5 minutes hein, il tètera plus tard. "
"Mais laisse-le un peu."
" Non, moi je veux rentrer. Hein, on va rentrer à la maison. Tiens, prends-le."
J'hésite, je voudrais leur parler... Devrais-je mettre carrément Pitère au sein moi aussi pour que cette maman ne se sente pas gênée d'allaiter, là, dans ce lieu accueillant pour les bébés téteurs? Je ne le fais pas, et j'ai le coeur serré.
Il y a deux ans, dans une ville qui n'est pas la nôtre, devant chez des amis. Piwouane a 2 ans et demi, elle hurle comme une damnée, se roule par terre, en pleine crise de je ne sais plus quoi et surtout étourdie de fatigue. Stressée par l'environnement inconnu, par le fait qu'on soit dans la rue, je réagis avec raideur, j'essaie de la contenir,je menace, je m'énerve, je crie moi aussi. Elle s'époumonne de plus belle, de son cri le plus aigü.
Une dame sort de chez elle : "Vous avez besoin d'aide?"
Je l'envoie bouler sèchement : " Non, ça va".
Pas envie d'aide, du moins pas envie de son aide. L'intervention peut-être bienveillante de cette personne n'a pas apaisé ma colère ni celle de Piwouane, au contraire elle a attisé mon stress de parent qui déteste renvoyer une mauvaise image, qui craint d'agiter l'effroyable icône de l'enfant mal élevé...
Je repense souvent à cette scène et à la façon dont j'aurais réagi en tant que témoin. Je n'aurais rien dit, personnellement, mais je ne pense pas qu'il ne faille rien dire... Peut-être que la maman énervée en moi aurait su trouver des ressources si j'avais entendu : "Ce n'est pas facile parfois!" Cette phrase, on me l'a déjà dite dans la rue, et j'y ai puisé un peu de soutien qui m'a parfois aidé à prendre du recul et à souffler, inspirer, souffler pour désamorcer ma propre bombe avant de chercher comment désamorcer celle de l'enfant...
La semaine dernière, le papa des fillettes a assisté à une petite démonstration désagréable devant le portail de l'école. Il m'en a parlé, un peu bouleversé. Une nounou (que j'identifie facilement, car elle est sans cesse en train de bavasser sur les parents des petits qu'elle garde, et pas spécialement pour en dire du bien...) se vantait auprès de ses consoeurs : elle donne des tapes aux enfants lorsqu'ils ne sont pas sages. Et hop d'ailleurs, puisque le petit se penche pour jeter un oeil hors de sa poussette, elle joint le geste à la parole : voilà, une tape comme ça. Si je connaissais les parents de cet enfant, je leur demanderais s'ils sont d'accord pour que la nounou frappe leur fils... Je ne me vois pas, ligotée par ma timidité, aborder cette femme et lui dire ce que je pense de son geste. Est-ce que si j'entamais le dialogue avec elle en lui disant combien je trouve son travail difficile, ou bien si je parlais à l'enfant, est-ce que ce serait bien accueilli? Est-ce que je me laisserais intimider par la crainte que les autres parents estiment que je fais de l'ingérence, ou l'angoisse de me retrouver nez à nez tous les midis avec cette merveilleuse nounou?
8.2.08
Où je tourne 7 fois ma langue dans ma bouche
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
9 commentaires:
Drôlement difficile de savoir... il me semble qu'il n'y a pas de règle acr moi-même, en cas de crise des enfants (ce qui arrive rarement à présent, ouf), je ne réagirais pas toujours de la même façon, en fonction du ton de l'autre et de mon humeur.
Je crois que le meilleur reste l'empathie, la compréhension, l'absence de jugement. Du style "Pas facile, cet âge-là", avec un grand sourire.
Quant à la nounou, je crois qu'il faut lui dire qu'elle n'a pas le droit. Et peut-être même en parler directement aux parents. Ou au relais assistantes maternelles. Ce n'est pas rien : si elle fait ça en public, que leur fait-elle chez eux ?
Pour finir, sur la maman qui a du mal à laisser son bébé téter, qui se positinne mal... moi aussi j'aurais eu envie d'intervenir mais on n'a jamais envie de passer pour une donneuse de leçons, n'est-ce pas ? Ce que je ferais, j'engagerais la conversation sur autre chose et puis je glisserais des trucs mine de rien en disant que pour moi ça "marchait".
C'est chouette que tu écrives régulièrement.Merci.
oui la maman dans la salle d'attente je pense que je l'aurais aider et mis Miss V au sein pour qu'une complicité se noue du regard d'ailleurs cela m'arrive souvent dans cette salle d'attente. En plus je pense que tu aurais eu les bons mots pour accompagner .
les mamans toutes neuves accueillent généralement bien les conseils s'ils sont formulés avec tact, la nounou je dirais aucune chance qu'elle prenne bien la chose, s'occuper d'enfants c'est son métier, elle rembarrera toutes celles qui auront l'air de vouloir lui apprendre son job.
Parler aux parents aurait plus de chance d'être efficace, encore qu'on trouve plein de familles où on estime qu'une tape est éducative et/ou anodine.
Difficile d'intervenir, je ne sais pas comment j'aurais réagi, moi non plus...
Telle, merci à toi : de me lire et de commenter aussi sagement!
Tirui, c'est bien ce que je pense aussi, concernant la nounou...
Ah moi, tout pareil... incapable de dire quoi que ce soit à qui que ce soit...
Mais le langage du corps est parfois efficace...
Pour avoir aussi connu les crises de TiBiscuit dans la rue et les regards qui en disaient long, je crois que je n'ose pas intervenir dans une conversation de peur qu'on pense "Pourquoi elle ramène sa science celle-ci?"
Par contre j'ai déjà apprécié les paroles de certaines personnes, paroles dites à TiBiscuit et non à moi et qui avaient le don de le calmer direct...
Quitte à me faire régarder de travers...je croie que j'aurais parlé ..sourtout pour la nounou à la main leste..je suportte pas...
Tout d'abord, merci d'écrire encore et encore, j'adore !
Pour la maman allaitante, je crois que je me serais permise d'intervenir, avec humour, ou en lui disant un truc du genre "C'est gai d'être ainsi proche de son petit, n'est-ce pas?", ou "Aaah, qu'est-ce qu'il est bien contre sa maman, bien au chaud, à prendre son repas...". A voir sur l'inspiration du moment.
Par contre, pour la nounou, c'est horrible ce qu'elle fait, et elle s'en vante en plus! Mais c'est délicat car je pense qu'une quelconque intervention ne la fera pas changer de comportement. Comme le dit Tirui, c'est son métier et elle n'acceptera jamais qu'on lui fasse des leçons. Mais je pense vraiment qu'il faille en informer les parents : s'ils n'ont pas la possibilité de retirer leurs enfants de sa garde (les places sont chères...), au moins ils pourront peut-être être plus fermes avec elle concernant les tapes et fessées. Ou alors, ça ne les dérangent pas, mais au moins ils sauront.
Enregistrer un commentaire